Non, la psychogénéalogie ne se fait pas en 90 € chrono (et encore moins en lévitation)
— Une petite mise au point douce mais ferme sur la vraie nature d’un art subtil trop souvent déformé —
Il y a des mots qui, un jour, deviennent tendance. Ils s’invitent dans les cafés, les stories Instagram, les cartes de visite bien décorées. Et la psychogénéalogie, ces dernières années, est devenue le condiment préféré du développement personnel.
C’est simple : aujourd’hui, elle est partout. On en met dans les lectures d’âme, dans les soins énergétiques, dans les cercles de lune, dans les tirages d’oracle, et même dans les messages reçus des dauphins atlantes (si si, promis, j’ai vu passer ça).
Mais il est temps de remettre les choses à leur place :
la psychogénéalogie n’est pas une poudre magique qu’on saupoudre sur toutes les pratiques.
Et surtout, ce n’est pas un "savoir-faire" qu’on achète avec 90 € et un joli certificat Canva.
Un art d’écoute, pas un super-pouvoir ésotérique
La psychogénéalogie est, avant tout, une faculté mentale, une intelligence des liens, une discipline de discernement.
C’est l’art de relier — pas de deviner, pas d’interpréter à la va-vite, pas de plaquer des scénarios tout faits.
Elle repose sur des faits, oui, mais surtout sur la subtilité des émotions qui les accompagnent.
Sur la justesse du lien. Pas sur l’ampleur du fantasme.
Et c’est justement parce qu’elle touche à l’invisible, à l’impalpable, qu’elle demande tant de rigueur.
Pas moins.
Pas "juste une bonne intuition" ou "un don pour ressentir".
Parce que ressentir, c’est bien. Mais ressentir juste, et accompagner proprement, c’est autre chose.
Vouloir tout savoir, tout comprendre, tout guérir… c’est dangereux.
On ne compte plus les gens qui arrivent en séance ou en formation avec ce besoin de tout savoir sur leur arbre.
Comme si le but était de tout révéler, tout expliquer, tout démonter.
Mais la psychogénéalogie, ce n’est pas de l’archéologie de la souffrance.
Ce n’est pas une course au scoop familial.
Ce n’est pas non plus un roman à écrire à la place des ancêtres.
Ce qui compte, ce n’est pas de savoir tout ce qui s’est passé,
mais de comprendre ce qui se rejoue intérieurement, émotionnellement, dans le présent.
Et ça, ça demande du temps. Du silence. De la délicatesse.
Et surtout… de l’humilité.
La montée des “psychogénéalogistes-perchés” : un vrai risque
Le souci aujourd’hui, c’est la prolifération de “praticiens” qui ont suivi une micro-formation, regardé deux vidéos YouTube et validé leur “connexion à l’arbre” via un pendule ou une carte.
Et qui, ensuite, te disent avec aplomb que ta fausse couche vient d’un viol subi par ton arrière-grand-mère,
ou que ton célibat est dû à une malédiction familiale sur l’amour depuis 1830.
Mais tu sais quoi ?
Ce n’est pas sérieux. Et c’est dangereux.
Parce que tu n’as pas besoin qu’on t’impose une mémoire si ce n’est pas la tienne.
Tu n’as pas besoin qu’on projette des drames là où il y a simplement une douleur en construction.
La vraie psychogénéalogie ne fait pas de sensationnalisme.
Elle ne t’embrouille pas l’esprit avec des projections pseudo-énergétiques.
Elle t’aide à éclairer ton vécu avec justesse, dans le respect de ce que tu peux entendre.
Ce que c’est, vraiment : une posture, pas juste un outil
Être psychogénéalogiste, ce n’est pas juste savoir lire un arbre.
C’est être capable de rester là, sans jugement, face à une émotion crue.
C’est savoir ne pas tout dire. Savoir attendre.
C’est reconnaître qu’on n’a pas tous les éléments — et que parfois, c’est mieux ainsi.
C’est une posture, pas un costume.
Et c’est ça, le problème de ces formations rapides :
elles enseignent une technique, mais pas la posture.
Elles donnent des clés sans parler des portes qu’il vaut mieux ne pas ouvrir n’importe comment.
Alors… on fait quoi ?
On ralentit.
On respire.
On comprend que la psychogénéalogie, ce n’est pas pour briller en consultation, c’est pour éclairer des chemins intérieurs.
On arrête de chercher à “savoir” et on apprend à écouter.
Et si tu ressens un appel profond, si tu sens que ce langage te parle, alors vas-y.
Mais choisis une vraie formation.
Une qui t’apprend à devenir quelqu’un de fiable, pas juste quelqu’un de "connecté".
Parce que l’histoire de nos ancêtres mérite mieux qu’une interprétation au doigt mouillé.
Et toi aussi.
Anastasia GROSS